Alors que la moitié des schémas régionaux de raccordement des énergies renouvelables ont été rédigés, RTE publie un état des lieux qui fait apparaître de fortes différences de coût, de 0 € en Alsace à près de 70 €/kW en Midi-Pyrénées.
Institués par la loi Grenelle 2, les schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR) doivent permettre la traduction concrète des ambitions régionales en termes de production d'énergie renouvelables. Celles-ci sont fixées dans les schémas régionaux du climat de l'air et de l'énergie (SRCAE), élaborés par l'Etat et la région en concertation avec l'ensemble des parties prenantes. Les S3REnR analysent, six mois après l'adoption des SRCAE, les travaux de développement du réseau nécessaires à l'atteinte de ces objectifs (créations et renforcements), la capacité d'accueil des EnR (globale et par poste), le coût prévisionnel des ouvrages à créer et le calendrier prévisionnel des études à réaliser et procédures à suivre pour la réalisation des travaux. Au 31 mars 2014, neuf S3REnR sur les vingt et un attendus ont été approuvés selon le gestionnaire de réseau RTE qui a publié un état des lieux. D'autres schémas devraient être publiés prochainement, puisque 19 des 21 SRCAE ont déjà été approuvés et adoptés.
Une meilleure connaissance des besoins
Selon les SRCAE, les potentiels cumulés des régions s'élèvent aujourd'hui à 28.600 MW pour l'éolien et 15.400 MW pour le solaire photovoltaïque. Des chiffres situés "au-delà des ambitions nationales fixées à 19.000 MW d'éolien terrestre et à 5.400 MW de solaire photovoltaïque", souligne RTE. Les schémas mettent en avant les disparités régionales, liées principalement aux différences de gisements de vents et d'ensoleillement. "Pour l'éolien, certains schémas régionaux, comme ceux des régions Champagne-Ardenne, Picardie, Languedoc-Roussillon et Centre affichent un objectif supérieur à 2.000 MW quand cet objectif est de quelques centaines de mégawatts en Franche-Comté ou en Ile-de- France". Pour le photovoltaïque, sans surprise, l'objectif le plus élevé a été fixé par la région Provence- Alpes-Côte-d'Azur (2.300 MW), tandis que la Basse-Normandie ne vise que 86 MW. Selon RTE, "les objectifs et la localisation des gisements sont affinés au moment de l'élaboration des S3REnR". En effet, outre les gisements d'EnR, il faut étudier les capacités d'accueil des réseaux de transport et de distribution d'électricité, et les développements nécessaires. Le coût des ouvrages à renforcer est à la charge des gestionnaires de réseau concernés. En revanche, la loi prévoit que le coût prévisionnel des ouvrages de raccordement à créer sur une région, et qui constituent des développements spécifiques à l'accueil des énergies renouvelables, soit pris en charge par les producteurs de manière mutualisée. Chaque producteur doit payer une quote-part au prorata de la capacité qu'il a installée. En échange, une partie des capacités d'accueil du réseau doit être réservée aux énergies renouvelables pendant dix ans. Ce point est, depuis la mise en place du dispositif, au cœur de crispations entre gestionnaires de réseaux et producteurs d'EnR. En janvier dernier, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) estimait que les modalités de calcul de cette quote-part faisaient porter aux producteurs d'EnR "85% des coûts de l'adaptation du réseau public « amont » qui, s'ajoutant au coût de leurs ouvrages propres, entraînent une augmentation significative des coûts de raccordement par rapport au régime précédent".
De fortes disparités régionales dans les coûts de raccordement
Dans son état des lieux, RTE s'est penché sur les douze schémas de raccordement déposés et/ou approuvés au 31 mars 2014. Face à l'objectif fixé de 23.100 MW d'énergies renouvelables à l'horizon 2020, près de 12.100 MW de capacités ont été réservés à l'accueil de ces EnR (de 471 MW en Alsace à 1.805 MW en Midi-Pyrénées), dont 4.800 MW à la suite de l'approbation des S3REnR. L'état des lieux met surtout en exergue les fortes disparités de coûts de raccordement entre régions. En moyenne, les quotes-parts atteignent 31,5 € par kilowatt installé sur les réseaux de transport et de distribution. Cependant, en Alsace cette quote-part est nulle (0 €), dans le Nord-Pas-de-Calais elle est fixée à 9,19 €/kW, tandis qu'en Picardie, région voisine, elle est de 58,67 €/kW. En Midi-Pyrénées, elle atteint même 69,85 €/kW. Pourquoi une telle différence ? Il suffit d'aller jeter un œil à ces schémas de raccordement. En Alsace, les travaux de concertation ont permis, grâce à une modification de la répartition des gisements de production d'EnR (471 MW), "de proposer un schéma sans investissement sur le réseau dans le périmètre de mutualisation, donc avec quote-part régionale nulle, tout en maintenant des distances de raccordement acceptables". En revanche, en Midi-Pyrénées 153 M€ d'investissements apparaissent nécessaires sur les réseaux de transport et de distribution pour accueillir 850 MW de capacités nouvelles (qui s'ajoutent au 950 MW déjà installés), dont 126 M€ de créations d'ouvrages (qui reviennent donc à la charge des producteurs). La quote-part est donc fixée à 69,9 €/kW. Ce montant "permet une couverture large des territoires, l'accueil d'éolien en puissance dans les zones du schéma régional éolien (SRE), et préserve les équilibres nécessaires pour l'accueil des autres EnR, de moindre puissance", souligne le S3REnR. Le Nord-Pas-de-Calais, pour accueillir 1.966 MW d'EnR en 2020, devra créer pour 8,9 M€ de capacité nouvelle d'accueil (265 MW). Résultat : une quote-part de 9,19 €/kW. Dans la région voisine, en Picardie, 800 MW de capacités
nouvelles doivent être créés, à hauteur de 57,2 M€. La quote-part atteint donc 58,6 €/kW.
"Pour les secteurs à fort potentiel de production d'énergies renouvelables mais à capacité de raccordement limitée, ni la modification des schémas d'exploitation, ni la modification de la répartition sur les postes desservant la zone ne permet d'accueillir l'importante production envisagée, souligne le S3REnR, qui ajoute : Seuls la création ou le renforcement d'ouvrages permettent d'offrir des solutions".
Source, journal ou site Internet : actu-environnement
Date : 28 mai 2014
Auteur : Sophie Fabrégat