Les dépenses de la sécurité sociale ont augmenté de 48% au Royaume-Uni de 1997 à 2007. La sécurité sociale britannique est constituée de 51 allocations différentes (matérialisées sous forme de crédits d’impôts pour le chômage, le coût de la vie, les salaires bas, les familles avec enfants…). David Cameron a décidé de les remplacer par un crédit universel.
Les crédits d’impôt sont administrés localement et d’autres le sont au niveau central. Il y a aussi une demande différente pour chaque allocation et la procédure pour faire des changements est donc très difficile. A cause de cette complexité, des millions de ménages éligibles n’ont pas reçu d’allocations familiales ou, à l’autre extrême, les demandeurs actuels sont complètement dépendants de cette aide sociale.
Le but du crédit universel est d’inciter davantage les personnes au chômage à retrouver rapidement un travail, de réduire la complexité de la sécurité sociale et de combattre la pauvreté, les fraudes, les erreurs et baisser le coût de la sécurité sociale. Avec la simplification du système des aides sociales, le gouvernement prévoit que 350 000 enfants et 500 000 adultes en âge de travailler vont sortir de la pauvreté grâce à la hausse des demandes d’allocations et l’augmentation des bourses.
Le crédit universel va remplacer au Royaume-Uni les allocations qui dépendent des ressources familiales, les crédits d’impôt pour enfants à charge, les crédits d’impôt de travail et l’allocation de logement et, en particulier, les crédits d’impôt pour les personnes en âge de travailler. Ce crédit sera plafonné à 500 livres par semaine pour les couples et les parents isolés. Par ailleurs, le gouvernement a décidé d'un plafond de revalorisation annuelle fixé à 1% en matière de crédit universel, ce qui permettra une économie de 3,1 milliards de livres en 2016. Le nouveau système sera mis en place au Royaume-Uni en octobre 2013. Tous les bénéficiaires vont passer du système actuel au nouveau système d’avril 2014 à 2017.
Grâce à cette réforme, le Royaume-Uni anticipe à la fois des économies sur les dépenses sociales et une baisse du taux de non-recours lié à la complexité des aides antérieures. L’innovation de la réforme du "welfare" britannique est le plafond de 500 livres maximum par semaine.
En France il n’existe aucun plafond d’aides cumulées maximum par mois. Pourtant, nous sommes confrontés à un problème majeur : l’explosion des dépenses sociales (268 milliards d’euros en 1990, 621 milliards en 2010). Et notamment à une augmentation très importante du coût des aides versées sous conditions de ressources. La France gagnerait à s’inspirer de la réforme britannique. Voici nos propositions :
- Proposition 1: fusionner et plafonner les aides sociales sur critères de ressources.
Intégrer en une seule aide globale en espèces, à partir des minima sociaux, les diverses aides (RSA (selon la formule actuelle), toutes les prestations familiales (APL, AF, ACF, ASF, ARS, les quatre prestations PAJE), la prime de rentrée, la prime de Noël, les réductions de taxe d’habitation et de redevance audiovisuelle, tous les tarifs sociaux, les cartes transport, la CMUC et l’ACS, et la prime pour l’emploi.) correspondant à un complément de revenus sous critères de ressources avec un plafond annuel voté par le Parlement. Cette prestation serait plafonnée en suivant l’exemple britannique à, par exemple, 2 000 euros par mois et par foyer fiscal.
En tout état de cause, un plafonnement général de ressources (qui pourrait être fixé entre 2 000 et 2 500 euros nets par mois) devrait être instauré, au-delà duquel aucune prestation sous condition de ressources ne serait versée quelle que soit la configuration du ménage. Enfin, ces mesures devraient être complétées par une révision des droits connexes et un contrôle du non-travail.
- Proposition 2 : fiscaliser les aides sociales
Aucune des prestations sociales, dont les règles de cumul sont de plus d’une folle complexité, n’est incluse dans le revenu annuel imposable des ménages.
Résultat : il est impossible de savoir quel est le montant total des ressources versées par foyer. Nous estimons qu’il faudrait instituer de façon générale la fiscalisation des prestations reçues en espèces, comme la Fondation iFRAP l’a souvent évoqué. Pourquoi, à ressources totales égales, un foyer fiscal ne disposant que de revenus du travail, sur lesquels il subit cotisations patronales, salariales et CSG, paierait l’impôt sur le revenu, alors qu’un autre foyer dont les ressources sont composées en tout ou partie de prestations d’assistance, n’en paierait pas ? Compte tenu du nombre d’allocations disponibles, cette situation n’est pas rare. Au plan pratique, la fiscalisation serait le moyen de connaître avec précision le montant des revenus d’assistance de chacun.
Sur les dépenses sociales, la cible doit être d’économiser, comme pour le reste des dépenses publiques, 5% des dépenses annuelles, soit 29,9 milliards. En pensant à l’objectif de réduire les dépenses sociales, on a souvent tort, comme le démontrent les débats actuels, de limiter la recherche à la diminution des prestations sociales, sans évoquer le coût de gestion de ces prestations.
Rappelons par exemple que ce coût, pour l’ensemble des prestations sociales, est d’environ 35 milliards d’euros. Or, plus un système est complexe, plus sa gestion est onéreuse. Rien que sur une simplification du système de distribution des aides, plus de 6 milliards pourraient être économisés par an. Pour le reste, soit environ 23 milliards, c’est la transparence puis la fusion, le plafonnement et la fiscalisation des aides qui pourront permettre de baisser les dépenses.
Cela dit, les deux gros volets en matière de dépenses sociales sont ceux de la vieillesse (278 milliards d’euros par an) et celui de l’Assurance maladie (170 milliards d’euros par an). Pour baisser ces dépenses-là, il faudra fusionner les différentes caisses de retraites (y compris les retraites publiques) dans un système unique pour tous. Quant à l’Assurance maladie, une partie des économies pourra venir de la chasse aux soins inutiles (certains pays ont mis en place un montant maximum remboursé par pathologie) et de la réforme en profondeur de la gestion de nos hôpitaux publics (le débat sur le jour de carence a été éclairant sur le sujet). Une remise en question de la gestion paritaire de la Sécurité sociale devra aussi s’imposer peu à peu : soit les partenaires sociaux deviennent force de proposition pour maîtriser les dépenses sociales, soit ils renoncent à terme à leur rôle de gestionnaire.
Par Agnès Verdier-Molinié
son dernier livre: 60 milliards d'économies
Source:
Fondation IFRAP(Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques).
La Fondation iFRAP : Think Tank dédié à l'analyse des politiques publiques, laboratoire d'idées innovantes