Pendant la période de Bandoung et du Non -alignement (1955/1970-75), certains pays arabes se situaient aux avant-gardes des luttes pour la libération nationale et le progrès social. Ces régimes (Nasser en Égypte, le FLN algérien, le Baas en Syrie et en Irak) n' étaient pas démocratiques au sens occidental du terme - il s'agissait de régimes de parti unique-, ni au sens que je donne au terme qui implique le pouvoir exercé par les classes populaires par elles-mêmes. Mais ils n'en étaient pas moins parfaitement légitimes par les réalisations importantes à leur actif : un bond gigantesque de l'éducation qui permettait une ascension sociale vers le haut (les enfants de classes populaires entrant dans les classes moyennes en expansion), de la santé, des réformes agraires, des garanties d'emploi au moins pour tous les diplômés de tous les niveaux. Associées à des politiques d'indépendance anti impérialistes, ces réalisations faisaient la force des régimes, en dépit de l'hostilité permanente des puissances occidentales et des agressions militaires perpétrées par l intermédiaire d Israel.
Mais, après avoir réalisé ce dont ils étaient capables en deux décennies par les moyens qui leur étaient propres (des réformes mises en œuvre par en haut, sans jamais autoriser les classes populaires à s'organiser par elles même), ces régimes se sont essouffés. L' heure de la contre-offensive de l impérialisme avait sonné. Pour conserver leur pouvoir, les classes dirigeantes ont alors accepté de se soumettre aux exigences nouvelles dites du « néolibéralisme » - ouverture extérieure incontrôlée, privatisations etc. De ce fait, en quelques années tout ce qui avait été acquis a été perdu : retour massif du chômage et de la pauvreté, inégalités scandaleuses, corruption, abandon international de la dignité et soumission aux exigences de Washington, voire d Israël. En réponse à l' érosion rapide de leur légitimité les régimes ont répondu en glissant vers des pratiques de répression policières aggravées, avec le soutien de Washington.