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Le socialisme dépourvu de toute valeur éthique par Jacques Garello

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 Auguste Comte

La justice, l’égalité, le progrès, la paix, etc.

Les socialistes ne perdent pas une occasion de justifier leur projet de société en se référant à des valeurs a priori hautement dignes de respect, de nature à émouvoir les cœurs et à stimuler les esprits. Quelles belles choses, par exemple, que la justice, l’égalité, le progrès, la paix : qui ne s’en déclarerait pas partisan ?

Hélas, le contenu réel de ces concepts est tout à fait imprécis. La philosophie de Hayek ou la tradition thomiste rappelle que nous sommes ici dans une situation « d’inconnaissance ». On ne peut approcher ces concepts que par leur contraire : la paix est l’absence de guerre, tout comme la justice est l’absence d’injustice. Nous savons réagir à ces fléaux, mais nous ne savons pas comment les prévenir.

L’erreur des socialistes est de chercher à les éliminer en organisant d’une manière rationnelle la société parfaite. Ils détiennent les clés de la cité heureuse, éternelle, où tout le monde, sans discernement, sera heureux de vivre.

 

 

 

 

La morale du progrès social collectif

Dans la cité du futur, une fois l’utopie socialiste réalisée, les hommes auront atteint la perfection. Il n’y aura plus de lutte des classes, plus d’exploitation, donc plus d’exploitants. Chacun aura sa part de richesses et se fera le plus grand plaisir de s’en contenter. Chacun aura eu un égal accès à la connaissance, au bien être. Les occasions de conflits créés par les injustices de la vieille société auront disparu.

Par conséquent, malheur à ceux qui se mettent en travers de la route semée d’étoiles, et dont l’égoïsme freine l’avancée sociale généralisée. Les supprimer est sans doute légitime, mais il vaut mieux les éduquer : former l’homme nouveau, le préparer à l’avènement et à la construction de la société nouvelle. Les socialistes sont des « éducateurs ».

Ainsi la valeur morale de référence des socialistes est-elle de progresser collectivement vers l’utopie. Le socialisme, c’est le règne d’un futur idéal. Le « Programme Commun de la Gauche » concocté par les partis socialiste et communiste en 1973 était entièrement rédigé au futur : les Français étaient invités à entrer tout de suite, et de manière concrète, dans l’ère nouvelle.

 

Seules les personnes sont justes ou injustes

L’utopie collective situe ainsi les vertus morales au niveau de l’organisation sociale. Ils ignorent la réalité de l’être humain, ils ne savent pas que seules les personnes sont justes ou injustes, pacifiques ou belliqueuses, généreuses ou égoïstes. Cela ne les intéresse pas, puisque les structures de la société idéale mettent chacun d’entre nous dans une position égale, normalisée. Dans le pays socialiste, l’homme est « normal », la société est conçue pour qu’il le soit.

Quel contraste avec la diversité des personnes, quelle élimination de la « personnalité » ! Les socialistes n’aiment pas celui qui est indépendant, celui qui affirme une autonomie, un talent spécifique. D’où le soupçon, ou le mépris, voire la haine, pour celui qui fait mieux : défense de se singulariser.

Les socialistes ne savent pas que l’être humain se forme en permanence, s’épanouit ou se dégrade à la suite de son expérience. L’agir humain est ce qui forge la personne humaine.

Chacun a son histoire : les socialistes ne peuvent supporter cette idée, car pour eux il n’existe qu’une Histoire, qui donne son sens à la société. L’historicisme n’est pas la moindre erreur du socialisme. Le positivisme d’Auguste Comte (que tant de « libéraux » honorent) n’est que l’enfermement de l’être humain dans les âges de la société.

La construction de la personne n’intéresse pas les socialistes. Seule les passionne la construction de l’histoire sociale.

En fin de compte, pour mieux éliminer la personnalité, on finira par éliminer les personnes.

 

 Adam Smith

Pourquoi les socialistes ne peuvent être libéraux

Supposons que des socialistes sincères lisent sans a priori l’œuvre majeure d’Adam Smith, qui n’est pas « La Richesse des nations », mais bien « La Théorie des Sentiments Moraux » (publiée 17 ans plus tôt). Ils verraient comment une société de libertés repose avant tout sur le respect des individus, mais plus encore sur les efforts que chacun fait pour se mettre au diapason des autres : émulation, compréhension, échange. La vie en commun est faite de multitudes d’actions humaines inspirées par le désir de créer, de servir, d’apaiser.

La société n’est en fait qu’un réseau de relations personnelles fondées sur l’intérêt personnel certes, mais prenant en compte aussi les intérêts des autres. Plus tard, dans ses « Notes de Jurisprudence », Adam Smith marquera l’importance des institutions, c'est-à-dire de ces règles communément acceptées qui gouvernent les relations personnelles, au premier rang desquelles le droit de propriété et sa libre transmission.

Mais comme le soulignera Hayek, ces règles ne sont pas « créées », elles ne sont pas le fruit de la raison et de l’imagination de quelque architecte social, elles sont « spontanées » et naissent de la longue pratique des relations, elles évoluent elles-mêmes à l’usage.

C’est évidemment ce qu’un socialiste ne peut admettre. Il n’imagine pas de règle sociale autre que planifiée par quelque autorité supérieure et, pourquoi pas, par l’Etat (même si Marx avait prédit, sans doute pour être cohérent avec lui-même, le « dépérissement de l’Etat »).

 

L’homme au service de la société

On oppose souvent socialisme et libéralisme en disant que l’un met l’homme au service de la société tandis que l’autre met la société au service de l’homme. Je ne suis pas convaincu par cette approche, parce qu’elle est toujours « holiste » : elle fait de la société un acteur, un ensemble collectif, un tout doté de raison et de sentiment. Je le répète, après tant d’autres : seul l’être humain est acteur, seul il a raison et sentiment. La société n’est en fait qu’un réseau, mais n’a de consistance que par ceux qui sont en relations.

Les socialistes s’expriment souvent au nom de l’éthique. Ils devraient relire Aristote, et comprendre qu’il n’y a de bon et de beau que dans l’être humain. Le socialisme est la négation de l’éthique, parce qu’il ne s’intéresse pas aux hommes ; il ne parle aux hommes de justice, égalité, paix ou progrès que pour les mieux conduire sur la voie de la servitude.

 


Source: Libres.org , Aleps


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