Le comte et la comtesse Boni de Castellane avaient convié un certain nombre de leurs amis à venir entendre, hier, une conférence de notre distingué collaborateur, M. Maurice Talmeyr, sur « la franc-maçonnerie et la Révolution française », nous explique Julien de Narfon.
Innovation curieuse et intéressante, en même temps que plaisir singulièrement instructif et délicat, dont je m’assure que l’austérité relative n’a rebuté nul de ceux qui avaient eu la bonne fortune de recevoir une invitation, car, bien avant l’heure où M. Maurice Talmeyr devait prendre la parole, une file d’équipages, dont le nombre augmentait de minute en minute, stationnaient déjà, devant le superbe hôtel de l’avenue Malakoff, cependant qu’une élite où l’élément politique se trouvait curieusement mêlé aux plus mondaines élégances, commençait de se presser dans la salle des conférences, dont le comte Boni de Castellane, veillant lui-même au placement des invités, et la comtesse Boni de Castellane, faisaient les honneurs avec la plus aimable intention.
Citant quelques noms de personnalités parmi les plus notoires présentes, le journaliste poursuit.
— Voilà beau temps, me dit avec la grâce très affable qui lui est coutumière M. Boni de Castellane, que je pense que l’histoire de la Révolution est à refaire. Ceux-là nous ont trompés qui nous ont montré la Révolution comme un mouvement national. Mais alors, comment l’expliquer elle-même et quel en fut donc le mystérieux ouvrier ? Or, j’ai rencontré un homme que hantait, comme moi, ce curieux problème et nul en qui en a trouvé la solution. J’ai voulu lui donner l’occasion d’exposer à un public choisi des idées qui sont les miennes et dont l’intérêt ne me paraît pas pouvoir être mis en doute. De là la conférence que vous allez entendre.
Cette conférence, reprend Julien de Narfon, je veux dire tout de suite que le magnifique auditoire qui avait répondu à l’invitation de M. de Castellane l’a écoutée, d’un bout à l’autre, avec une attention quasi religieuse que méritaient bien d’ailleurs le sujet lui-même et la façon tout particulièrement intéressante dont il fut traité.
Ce que M. Maurice Talmeyr a voulu démontrer, c’est que la Révolution, bien loin qu’elle fût nationale dans ses origines profondes et dan ses aspirations, a été l’œuvre exclusive d’une secte qui tendait précisément et qui tend de nos jours encore à la destruction de toutes les nationalités. On conviendra que pareil thème était bien de nature à retenir l’attention d’hommes qui, par profession ou par piété filiale, ont le devoir de s’y intéresser.
Et ce thème, M. Maurice Talmeyr l’a exposé et développé, avec une clarté, une logique, une vigueur saisissantes et une abondance de documentation propre à satisfaire les critiques les plus exigeants. Aucun orateur ne cherche moins que lui à captiver par des moyens à côté la faveur de ceux qui l’écoutent. Il n’enguirlande pas la vérité. Il la montre telle quelle, avec preuves irrécusables à l’appui, et en un style sobre, incisif, sur un ton que l’on pourrait taxer peut-être d’un peu de monotonie, mais où l’on sent la profondeur d’une conviction qui veut se faire et qui devient dès les premiers mots communicative.
Le conférencier constate d’abord et met en pleine lumière « un grand fait général, c’est que l’histoire de la Révolution a toujours joui, jusqu’ici, du privilège singulier d’être acceptée comme histoire sans que personne au fond l’ait jamais expliquée ».
« D’après les documents les moins niables, explique Maurice Talmeyr, et contrairement à une légende audacieusement fabriquée, la nation française, comme masse populaire, en dehors d’une certaine noblesse, d’un certain clergé et d’une certaine bourgeoisie, était alors profondément catholique et royaliste. »
Et comment, dès lors, comprendre « une nation qui a la religion et la monarchie dans le sang, qui les veut, qui ne veut qu’elles, et qui les renverse avec fureur » ?
Pour expliquer une aussi étrange anomalie, il suffit de montrer sur le fait l’action maçonnique dans la préparation, savamment graduée, de toutes les grands journées révolutionnaires, et les francs-maçons d’alors, ceux du moins qui étaient dans le secret, ne reculant, pour arriver à leurs fins, ni devant les crimes les plus affreux, ni devant la fraude la plus éhontée, ni devant les moyens les plus vils.
Toutefois la conjuration véritable n’apparaît vraiment qu’avec l’Illuminisme, fondé en 1776 par l’Allemand Weishaupt et dont la doctrine et le but étaient propremnt le « retour à l’état sauvage ». L’Illuminisme absorba en lui de 1780 à 1789 presque toutes les loges du monde entier. Il comptait dès 1780 environ 3 millions d’adeptes.
Est-il exact, comme on l’a dit, que la mise à mort de Louis XVI ait été décidée, dix ans d’avance, dans la tenue illuministe de Wilhelmsbad ? M. Maurice Talrmeyr ne l’affirme pas absolument, encore que le fait ne lui paraisse pas improbable. Et il rappelle cette curieuse « prophétie » échappée à l’illuministe Cazotte, trois ou quatre ans avant 1789, dans un dîner :
— Vous, monsieur Bailly, et vous, monsieur de Malesherbes, vous mourrez sur l’échafaud... Vous, madame, on vous conduira en charrette, mains liées derrière le dos, à la place des exécutions.
— Mais, monsieur le prophète, lui répondait en riant la duchesse de Grammont, ne me laisserez-vous pas au moins un confesseur ?
— Non, madame, non, lui répondait Cazotte énigmatique, non vous n’en aurez pas, et le dernier supplicié qui en aura un, ce sera le Roi !...
Cette prophétie ne serait-elle pas plutôt de « l’information anticipée » et pour cause ?
Il nous est malheureusement impossible de suivre le conférencier dans le détail de son argumentation très serrée, d’où il résulte, par le simple rapprochement de faits innombrables et dont la révélation est du plus haut intérêt, que « toute la Révolution s’explique par une permanente conjuration des loges où rien n’est aussi complètement absent que la spontanéité, et où les deux moyens de machination, selon les prescriptions exactes de Weishaupt, ne cessent jamais d’être un seul instant la trahison la plus prodigieusement répandue et la plus sauvage violence ».
La trahison, elle était partout à la Cour de Louis XVI. Dans cet ordre d’idées, M. Maurice Talmeyr établit sur des documents irrécusables que le Roi n’a jamais donné, au 10 août 1792 cet ordre de cesser le feu, qui perdit la monarchie et qui fut donné cependant au nom du Roi.
Il prouve de mente que ni l’assemblée législative n’a voté l’emprisonnement de Louis XVI au Temple, ni la Convention n’a voté la mort du Roi. L’assemblée législative a voté que le Roi logerait au palais du Temple, mais non pas dans la Tour du Temple, qui était une prison.
Et quant à la Convention, elle a réellement repoussé la mort du Roi par 13 voix de majorité. C’est un pouvoir occulte qui a emprisonné le Roi et qui l’a condamné à mort par falsification de scrutin. Et ce pouvoir occulte, c’est la franc-maçonnerie. Ce n’est pas là, évidemment, ce que nous ont appris les historiens de la Révolution, et M. Maurice Talmeyr semble conclure à bon droit :
« Nous voyons maintenant que l’histoire de la Révolution est à refaire et que personne ne la sait, surtout parmi ceux qui devraient la savoir. Nous n’avons donc qu’une chose à faire, c’est de l’apprendre, d’abord pour la savoir, ensuite pour l’apprendre à la France. »
C’est là, somme toute, conclut Julien de Narfon, une œuvre de longue haleine et dont il faut louer M. de Castallane et M. Maurice Talmeyr d’avoir les premiers senti la nécessité. II est donc probable que la conférence d’hier sera suivie d’autres, qui ne serviront pas moins, sur le terrain de la vérité historique, la cause de la religion et du patriotisme.
La franc-maçonnerie et la Révolution française
Quelle est l'influence de la franc maçonnerie dans les évènements de la Révolution française ? Nous tenterons d'y répondre avec Alain Benajam et Thierry Meyssan (ancien franc maçon). Nous po...
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