Le sentiment croissant d’incapacité des politiques à sauver notre pays alimente la montée en puissance des extrêmes.
Cette tarte à la crème sera d’autant plus nimbée de cyanure quand les prochaines élections accorderont des scores jamais atteints à Le Pen et Mélenchon. Les votes protestataires ou désabusés s’ajoutent à la séduction des foules par des messages similaires : décapiter les élites, fermer les frontières, se replier sur soi, dénoncer l’étranger tout autant que le marché, et donner un grand coup de barre à gauche sur le plan économique. Alors que nous fonçons dans le mur, on nous propose d’en construire un, plus proche !
Il faut donc réagir. Maintenant. Intensément. Joyeusement. Bien entendu, l’inattractivité des partis tétanise. A gauche, Harlem
ne provoque aucun désir. A droite, la lutte fratricide domine, chacun pensant qu’il suffit de terminer la course à sac en tête pour battre le « nul de l’Elysée » (sic). Les couteaux sont plus
acérés que les claviers, la bataille des idées étant reléguée à plus tard, c’est-à-dire à jamais. Jean-François Copé a toutefois innové avec son excellente initiative citoyenne d’une UMP
mobilisant ses militants, Camille Bedin en tête, pour apporter du soutien scolaire, de l’aide aux personnes âgées ou de la formation aux chômeurs au sein de leur fédération. Enfin la solidarité
privée, alternative incontournable à la faillite de la générosité publique, irrigue un parti. Saluons-le.
Encore dans l’ombre, certaines initiatives spontanées fleurissent. Ici, des entrepreneurs ambitionnant de sortir de leur sphère réservée. Là, des
hommes et des femmes de bonne volonté, unis par des qualités humaines et le désir de résister, comme au temps de la France Libre, et bientôt emmenés par un romancier à grand succès. La France
n’ayant pas connu son printemps libérateur vivra peut-être son été indien de la révolution civile.
Car oui, les extrêmes n’ont pas le monopole de la révolution. La vraie révolution est en nous. Sans la société civile, tout s’effondre.
Le vrai pouvoir, nous en sommes l’essence, et nous le méritons. C’est donc à vous, à nous, de prendre des initiatives et de nous
unir pour contraindre les politiques à nous le restituer. Via les partis et ces nouveaux mouvements, qu’il faut noyauter de « gens biens ». A travers nos comportements quotidiens, aussi. Et il
en va des plus anonymes comme des plus médiatiques. Dès lors que la BPI existe, Nicolas Dufourcq a raison de préférer aider l’industrie innovante à conquérir le monde au « sauvetage » à fonds
perdus des causes désespérées. Xavier Niel est révolutionnaire quand il investit 50 millions dans « 42 », son école novatrice qui formera les stars de l’Internet de demain, bacheliers ou non.
Maurice Lévy l’est aussi en appliquant, le premier, le « say-on-pay » chez Publicis pour redonner aux actionnaires le pouvoir perdu de discuter des mécanismes de rémunération des managers. La
révolution, c’est remettre le pays à l’endroit en pariant — quelle audace ! — sur chacun de nous.
La révolution, c'est nous!
Source:
Mathieu Laine dirige la société de conseil en stratégie Altermind. Son dernier ouvrage, avec Patrice Huerre, La France adolescente (Lattès, 2013).