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AA AH ya bon les taux bas!!!

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AAAou pas AAA, l'Etat français trouve touiours des prêteurs pour financer sa dette à des taux très bas. Même après l’abaissement de la note de la France par Moody’s en début de semaine, les investisseurs sont donc prêts à accepter un rendement faible pour détenir de la dette française. Au grand dam des Anglo-saxons qui n’ont de cesse d’alerter contre l’immobilisme hexagonal et les risques sous-jacents pour l’économie à court terme.

De son côté, François Hollande a bien compris tout l’intérêt d’être financé à des conditionsd’empruntsdéfiant toute concurrence. 

Il soigne la susceptibilité des marchés et leur promet des mesures de rigueur budgétaire avec 60 milliards d’économies d’ici cinq ans. C’est le prix à payer pour ne débourser que 1% ou 2% d’intérêts lorsque l’Italie et l’Espagne empruntent à des taux supérieurs à 5% ou 6%. Qui aurait pu imaginer que la France bénéficierait d’un tel avantage concurrentiel, d’autant, il est vrai, qu’aucune mesure d’austérité n’a été prise et ne le sera apparemment? Jean-Marc Ayrault l’a rappelé récemment, la politique menée par son gouvernement est «unepolitique rigoureuse, pour maîtriser nos comptes publics».Et d’ajouter, «l'austérité,vous savez ce que c'est, c'est la baisse des salaires, des pensions, des prestations familiales, c'est des milliers de suppressions d'emplois, ce n'est pas ce que nous pratiquons».


Une dette attractive

Ainsi, les réformes structurelles, celles qui sont mises en place dans les autres pays de la zone euro, ne sont toujours pas d’actualité en France. La réforme fiscale, la réforme du marché du travail, celle de la santé, et bien d’autres restent pour l’instant ignorées. Ce sont davantage des actions ponctuelles et homéopathiques qui ont été choisies. Cette inertie française irrite de plus en plus. Notamment les Britanniques et les Allemands qui crient au scandale estimant que c'est reculer pour mieux sauter. A l’instar des réformes menées par l’Agenda 2010 en Allemagne, ou au même titre que les mesures d’austérité menées à marche forcée en Espagne ou en Italie, la France ne pourra faire l’économie d’actions structurelles capables d’assainir durablement les comptes publics et de relancer activement le tissu industriel. Avec une activité quasi nulle depuis trois trimestres, un taux de chômage au zénith à plus de 10%, un déficit public à 4,5% du PIB au mieux cette année et une dette de plus de 90% du PIB, on peut se demander pourquoi les investisseurs se précipitent-ils pour acheter massivement de la dette française. Le manque d’alternatives explique cet enthousiasme. La crise des dettes souveraines en zone euro laisse de telles inquiétudes sur la santé économique de tous les pays périphériques (Italie, Espagne, Portugal, Irlande, Grèce), que faute de mieux, les investisseurs se tournent vers la France qui semble être à mi-chemin entre la situation économique allemande et le reste de l’Europe. L’obligation du trésor français se négocie à moins de 2% avec un écart de 74 points avec l’Allemagne. Il y a un an, cet écart était de 200 points.


Une première dans l'histoire française

Aujourd’hui, cette veine s’est propagée. Elle ne profite pas uniquement à l’Etat français, mais à l’ensemble des émetteurs français. Les grandes entreprises françaises surfent sur cette période opportune. Elles peuvent désormais s’endetter sur 10 ans à 2%. Une première dans l’histoire de la finance française. Ainsi, Air Liquide a emprunté récemment sur 9 ans 500 millions d’euros sur le marché obligataire à 2,10% de taux d’intérêt, Unibail Rodamco a levé la même somme sur 5 ans à 1,7% et Sanofi 750 millions sur 5 ans aussi à 1%. Sur les huit premiers mois de l’année, les entreprises ont levé sur le marché obligataire 37 milliards d’euros, alors que sur la même période de l’année précédente, elles avaient emprunté 22 milliards d’euros –soit 70% de plus en un an. Selon la Banque de France, l’endettement des sociétés non financières auprès des marchés continue d’augmenter rapidement. La dynamique reste soutenue. En août, la croissance de l’endettement auprès des marchés a bondi de 13,2% en rythme annuel alors que la progression des crédits bancaires reste modeste (+1,6%). Les banques restent très prudentes et rechignent toujours à prêter à la sphère privée. Mais, les grandes entreprises peuvent désormais profiter des nouvelles conditions de crédit offertes en France sur le marché obligataire. Dans un premier temps, avec ce niveau attractif de taux d’intérêt, elles vont rembourser leurs anciennes dettes qui avaient été contractées à des taux plus élevés. Ensuite, elles vont être incitées à améliorer leur appareil productif. La rentabilité d’une entreprise passe par l’investissement. Les grandes entreprises ont donc tout intérêt aujourd’hui à investir dans la recherche, des projets d’investissement ou des rachats d’entreprise.


La période est idéale pour financer leurs plans de développement. Même si les

perspectives de croissance restent moroses, le «choc de confiance», inspiré du rapport Gallois, pour améliorer la compétitivité des entreprises devrait aussi apporter un ballon d’oxygène nécessaire pour rendre la France plus productive. Quoi qu’on en dise, il existe aujourd’hui des raisons d’être optimiste pour les grandes entreprises françaises. Ce que l’Etat compte récolter en impôts sur ces sociétés, ces dernières peuvent le récupérer grâce au recul de la charge de leurs dettes. Le gouvernement français saura, sans aucun doute, mettre cet avantage en perspective pour les prochaines négociations, si tant est qu’il réussisse à maintenir des taux d’intérêt bas sur une longue période. Si c’est le cas, l’investissement pourrait repartir en France et les réformes structurelles seront plus faciles à mettre en place. En matière de communication, le gouvernement aurait tout intérêt à se détacher de l'obsession actuelle de l'exécutif européen et allemand de rigueur budgétaire et de montrer les avantages économiques des taux bas pour notre croissance. Au final, c’est une opportunité inattendue pour aider à relancer l’investissement productif en France qui est bien notre problème structurel majeur.

 

Stéphanie Villers


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